Yvan Colonna : Interview de maître Sollacaro
Yvan Colonna : Interview de maître Sollacaro
Depuis le début de l'affaire Colonna, la presse s'est déchaînée bafouant toutes les lois sur le secret de l'instruction ou sur la présomption d'innocence. Il faut dire que plusieurs ministres avaient montré le mauvais exemple. Où en sommes nous, deux ans après son arrestation :
U Ribombu : Le mandat de dépôt d'Yvan Colonna vient d'être prolongé de six mois. Comment le juge des libertés et de la détention a-t-il pu justifier ce prolongement, alors que depuis deux ans le dossier concernant Yvan Colonna fait " pchiiit " et qu'aucun élément à charge n'est venu s'ajouter ?
Maître Sollacaro : Il le justifie par " l'absence de garanties de représentation " et par le trouble à l'ordre public causé par l'assassinat d'un symbole de l'Etat.
U Rib. : Yvan Colonna a passé une première année de détention en isolement total sans que cela ne puisse se justifier. Comptez-vous entreprendre des démarches judiciaires pour dénoncer cela ? Et quelles sont ses conditions de détention actuelles ?
M. S. : La mesure d'isolement a été levée au moment où nous nous apprêtions à saisir le tribunal Administratif. Les conditions de détention actuelles sont celles d'un détenu particulièrement surveillé.
U Rib. : Nous avons entendu à plusieurs reprises une femme qui s'exprimait sur le forum de RCFM en disant qu'elle était témoin visuel du crime, qu'elle avait fait le soir même un portrait- robot de l'assassin, mais que depuis qu'elle avait dit en 1999, en voyant la photo d'Yvan Colonna à la Une de tous les journaux que ce n'était pas lui qu'elle avait vu le février 1998 en train de tuer le préfet, plus personne ne voulait l'écouter parmi les magistrats en charge de l'enquête. Cette femme a-t-elle été entendue depuis ? A-t-elle été confrontée à Yvan Colonna ?
M. S. : Cette femme n'a jamais été entendue, ni confrontée à Yvan Colonna. Il nous est interdit de la rencontrer, mais nous nous réservons la possibilité de la citer au moment opportun.
U Rib. : Vous avez demandé à plusieurs reprises des confrontations entre votre client et les membres du commando qui l'avait mis en cause dans un premier temps, avant de se rétracter. Avez-vous obtenu satisfaction ?
M. S. : Uniquement dans l'affaire de Pietrosella. Ces confrontations n'ont pas eu lieu dans le dossier Erignac, alors que les deux dossiers ne sont pas joints et sont instruits par deux magistrats différents.
U Rib. : Lorsque Petru Alessandri a courageusement avoué être la personne qui a tiré sur le préfet Erignac, les avocats de la famille Erignac ont dit que c'était facile de s'accuser après le procès et qu'il ne risquait plus rien. Or, Petru Alessandri a été condamné à perpétuité certes, mais sans période de sûreté, c'est-à-dire que dans 12 ans, il pourrait demander à faire commuer sa peine en une peine de 20 ans, puis à demander une libération conditionnelle. Quelles seront à ce moment pour lui les conséquences de sa déclaration ?
M. S. : Elles seront lourdes car on lui fera payer ses déclarations par des années de prison supplémentaires, alors qu'on devrait lui reconnaître enfin le mérite de dire la vérité.
U Rib. : Le fait que Petru Alessandri ait remis la deuxième arme dérobée à la gendarmerie de Petrusedda renforce-t-il sa crédibilité quand il s'accuse du meurtre du préfet ?
M. S. : Oui car cela atteste qu'il avait un rôle prépondérant dans cette opération, rôle qui semblait dévolu jusque là à Yvan Colonna.
U Rib. : Les expertises balistiques des spécialistes de la police scientifique quant à la taille du tueur sont-elles compatibles avec la taille d'Yvan Colonna ?
M. S. : Elles constituent un élément matériel, entre autres, qui plaide en faveur de l'innocence d'Yvan Colonna.
U Rib. : Finalement, après deux ans d'interrogatoires et d'enquêtes, quels sont les éléments à charge qu'il reste dans le dossier contre Yvan Colonna ?
M. S. : Les premières mises en cause, rétractées à plusieurs reprises et expliquées et la " fuite " d'Yvan Colonna.
U Rib. : Et quels sont les éléments que vous avez pu porter pour prouver l'innocence de votre client, qui a toujours nié les faits, même lors qu'il avait pris du recul et que toutes les polices de France, et même de plus loin, le recherchaient en le traitant de " tueur de préfet " ?
M. S. : Le ministère public s'oppose lors de chaque renouvellement de mandat de dépôt à la publicité des débats que nous demandons. La justice antiterroriste craint le débat public car nous pourrions alors plaider ce que le secret de l'instruction nous interdit de publier.
U Rib. : Comment jugez-vous l'acharnement médiatique dont Yvan Colonna est victime depuis le début de cette affaire, et les déclarations d'un ministre de la justice qui parlait de " présomption de culpabilité " ou encore d'un ministre de l'intérieur qui annonçait l'arrestation du " tueur du préfet " ?
M. S. : L'acharnement médiatique a été largement orchestré par le Ministère de l'Intérieur, dans un premier temps pour faire un contre feu à l'affaire du Préfet Bonnet qui venait d'être incarcéré, et puis dans un deuxième temps, par le caractère de " cause nationale et sacrée " donné à cette affaire par l'Etat dont un symbole avait été assassiné.
U Rib. : Yvan Colonna peut-il attendre un jugement juste et impartial ?
M. S. : Dans ce contexte on a piétiné la présomption d'innocence et on peut se demander s'il existe en France (Patrie autoproclamée des droits de l'Homme), un juge suffisamment indépendant et impartial pour sauvegarder les principes face à la raison d'Etat.
Propos recueillis par Marzulinu
Pour en savoir plus Comité de soutien à Yvan Colonna
Sources U Ribombu
Posté par Adriana Evangelizt