Elections du CRIF, l’autre présidentielle

Publié le par Adriana EVANGELIZT

Elections du CRIF, l’autre présidentielle


Cet article de David Bronner a été publié le Lundi 23 avril 2007 sur Guysen Israël News. Il est à lire attentivement et se passe de commentaires…

Le deuxième mandat de Roger Cukierman arrive à terme. N’étant pas rééligible, son successeur sera élu par les membres de l’Assemblée générale le dimanche 13 mai à Paris .

La commission électorale, réunie le mardi 27 mars, avait enregistré les candidatures de Arié Bensemhoun, Henri Hajdenberg, Richard Prasquier et celle de Joseph Zrihen.

Mercredi 18 avril, les quatre candidats à la succession de Roger Cukierman à la présidence du CRIF ont planché devant l’ensemble des délégués de cette organisation, réunie en assemblée générale. Au cours de cette soirée organisée dans la transparence et l’équité, les quatre candidats à la succession de Roger Cukierman ont tour à tour présenté leurs programmes et répondu aux questions posées par les délégués qui étaient présents.

Richard Prasquier, « Il n’y a pas de génétique de l’antisémitisme »

Richard Prasquier fait partie de ceux qui pensent que les hommes peuvent changer. Dans son discours de campagne, il illustre son propos avec une histoire personnelle qui retient l’attention de son auditoire : la gifle.
Alors qu’il est en classe de première au lycée Charlemagne à Paris, Richard Prasquier répond par une gifle à l’un de ses camarades de classe qui tient de virulents propos antisémites. Des années plus tard, il reçoit une belle lettre du camarade en question qui lui demande pardon… Richard Prasquier dès lors est convaincu que les antisémites peuvent changer d’avis, qu’il n’existe pas de « génétique de l’antisémitisme ».

Président du Comité Français pour Yad Vashem, Richard Prasquier, vice-président du CRIF aux côtés de Roger Cukierman depuis des années, compte placer la question du combat contre l’antisémitisme au cœur de son action militante. Et celui-ci est protéiforme : il s’agit d’un combat pour la mémoire de la Shoah, où le CRIF doit directement agir dans le domaine de l’éducation.

Richard Prasquier entend présider un CRIF « uni dans la diversité ». Il regrette à ce titre l’absence du Consistoire Central dont il souhaite la réintégration rue Broca. Sa vision du dialogue interreligieux est ouverte : si les relations avec les Protestants doivent s’améliorer, il témoigne de rapports parfois exceptionnels avec les Catholiques. Le Père Desbois est cité et, comme pour rassurer ses amis, il rappelle que le Vatican a finalement participé aux commémorations du Yom Hashoah au Yad Vashem. S’agissant des relations avec les Musulmans, il préconise la franchise et la sincérité. Quant aux relations avec les communautés juives américaines, il préfère en laisser la charge à Pierre Besnainou, Président du Congrès Juif Européen.

« Il n’est pas question d’accepter l’antisionisme » martèle-t-il, « toutes mes activités militantes ont été orientées par Israël, qui est au centre de mes pensées… même si le gouvernement israélien fait parfois des erreurs, comme d’avoir dit à une certaine époque que la France était un pays antisémite »…

Interrogé sur ses « prestigieux soutiens », Richard Prasquier répond sur un ton amusé qu’il ne pensait pas être au Festival de Cannes… Mais ce sont Alain Finkielkraut, Alexandre Adler ou Frédéric Encel qui lui apportent leur soutien…

Jo Zrihen, « Ensemble, nous pourrons tout »

Jo Zrihen est un militant juif, engagé aux plus hautes instances du CRIF depuis huit ans : « deux années avec Henry, six autres avec Roger ». C’est auprès de Roger Cukierman qu’il apprend le métier de représentant des institutions juives de France. « Un rôle central auprès des pouvoirs publics, bien sûr, mais aussi un rôle central au sein de la société française ».

Le CRIF doit devenir une fédération d’associations qui ne s’expriment pas seulement par la voix de son seul Président, « Il faut lui rendre sa capacité réflective. Il faut qu’il retrouve sa fonction fédératrice, son unité et son efficacité devant les périples qui nous attendent. Je veux un CRIF ni de droite, ni de gauche, ni ashkénaze, ni sépharade. Un CRIF populaire non populiste. »

Son programme est construit comme un triptyque, et se résume en trois formules : lutter contre l’assimilation, développer notre influence, lutter contre le nouvel antisémitisme.

Au-delà des formules, justement, Jo Zrihen explique. Et c’est d’Israël qu’il choisit de parler en premier. « Il s’agit de réaffirmer sans cesse notre solidarité avec Israël, de contrer sa réprobation et sa détestation. »

Concernant la menace iranienne, Jo Zrihen évoque les pressions politiques qu’il faudra continuer d’exercer sur les pouvoirs publics, « nous exigeons des sanctions » lance-t-il en dénonçant les tentations munichoises. Souhaitant bâtir une stratégie de communication pour contrer la détestation d’Israël, Jo Zrihen évoque l’entrée d’Israël dans la Francophonie.

Parce que les Juifs sont particulièrement sensibles aux tragédies humaines, le candidat à la présidence du CRIF évoque le Darfour, et la Shoah. La nécessité de transmettre la mémoire de la Shoah, chez les Juifs comme chez les non Juifs.

Celui qui se décrit volontiers comme « incisif mais jamais agressif » se veut le candidat du dialogue et de l’unité, ouvert et fédérateur. « Ensemble, nous pourrons tout » résonne comme le slogan d’une campagne à l’image de Jo Zrihen, tonique, ambitieuse et chaleureuse.

Henri Hajdenberg, « L’expérience »

« Je suis un militant. Un militant de la LICRA, puis du Renouveau Juif. Je suis un homme d’action politique pour Israël »… Henri Hajdenberg est le candidat le plus expérimenté : deux fois élu président du CRIF, l’inventeur des « 12 heures pour Israël » dont il se plaît à dire que chaque fois, ces manifestations avaient réuni plus de 100 000 personnes, est fier de la mission qu’il avait alors accomplie.

« Nous avons soutenu l’Etat d’Israël » affirme-t-il avec force avant qu’on ne l’interroge sur sa rencontre avec Yasser Arafat. « Nous avons lancé le processus d’indemnisation » ajoute-t-il, en rappelant que c’est sous ses deux mandats que la mission d’étude sur la spoliation des Juifs de France aboutit au fameux Rapport Mattéoli.

« L’élection du président du CRIF est un moment de vérité » lance Henri Hajdenberg, et « la vérité, c’est que nous allons de crise en crise ». La recrudescence de l’antisémitisme et les agressions « comme jamais depuis 1945 », et les difficultés israéliennes tels que les conflits territoriaux avec les Palestiniens et la menace iranienne, constituent des enjeux importants pour lequel le candidat s’estime qualifié, grâce à son expérience, et aux stratégies qu’il propose. Il rappelle sa bonne connaissance du monde politique et des médias, ainsi que la nécessité de défendre Israël, le combat contre l’antisémitisme, les sanctions contre l’Iran, l’évolution de l’organisation du CRIF, les projets éducatifs pour la mémoire de la Shoah et contre l’antisémitisme.

Et puis, insiste-t-il, « il faut se donner des cibles, les problèmes dans les banlieues, la question iranienne… ». La mise en place de ces stratégies devra être accompagnée par des professionnels.

Arié Bensemhoun, « le benjamin »

« Le CRIF n’est pas une organisation traditionnelle. Etymologiquement, c’est un conseil. Le CRIF doit devenir un lieu de débats, de rencontres, d’échanges, un lieu d’analyse, ouvert sur la société française et au service de toute la communauté juive. » Arié Bensemhoun répète que le CRIF doit retrouver ce rôle. Le benjamin des candidats aime rappeler qu’il est déjà un « vieux militant ». Ancien EI, militant de l’UEJF, conseiller national au FSJU, responsable au CRIF Midi-Pyrénées depuis 1992, Arié Bensemhoun, chirurgien-dentiste de profession, consacre la moitié de son temps à la vie associative et communautaire.

Déjà candidat il y a neuf ans, Arié Bensemhoun apprécie le travail accompli par Roger Cukierman, qui a « géré le CRIF comme une entreprise », rendant ainsi l’institution plus efficace et plus moderne. « Au sein du CRIF, l’unité est nécessaire, mais il faut prendre garde et lutter contre les tentations hégémoniques ».

Partisan d’un « CRIF ouvert, citoyen et républicain », il aime rappeler qu’il a organisé le meeting de soutien en faveur du philosophe Robert Redeker au mois de novembre 2006.

Au terme de « rupture », il préfère l’emploi du « Renouveau » qu’il veut incarner : féminisation de l’institution, élargissement et ouverture, « pour que la communauté soit mieux représentée ».

Son projet de préparer la « génération de la mémoire » fait de lui un ardent partisan de la défense de la mémoire. Arié Bensemhoun refuse aussi la criminalisation d'Israël qui nourrit l'exécration des juifs et alimente la compétition victimaire et mémorielle, dope les négationnistes qui, loin de désarmer, trouvent partout dans le monde une incroyable audience ».

Il rappelle son « engagement total et farouche » au service d’Israël dont le problème d’image demeure sa « préoccupation constante », et la formule est belle : « Israël est en nous, et nous devons être davantage en Israël ».

Il trouve les mots justes pour rappeler l'antisémitisme traditionnel, toujours présent, et l'antisionisme qui a depuis longtemps « conquis les réseaux alter mondialistes, se conjuguent avec cette nouvelle judéophobie issue, en partie, des quartiers et de l'immigration arabo-musulmane ».

Arié Bensemhoun considère que les valeurs de la République sont nos meilleurs atouts pour éviter que perdure le « climat qui vise à nous exclure de la société dont nous incarnons les valeurs, pour nous renvoyer au ghetto et imposer une société communautarisée qui sonnerait le glas de la république laïque et démocratique, fille des Lumières ».

Respectueux du Chabbat, il estime que la loi juive n’est pas incompatible avec la fonction présidentielle, et affirme qu’il n’aura pas besoin de « consulter » pour prendre la décision de répondre au téléphone ou de conduire…

Les quatre candidats à la succession de Roger Cukierman ne manquent pas de talent, ni d’expérience. Ils ne manquent pas non plus de motivation et d’imagination pour servir et représenter les Juifs de France. Le choix des 160 électeurs du CRIF sera difficile, et le scrutin sans doute serré.

La lutte contre l’antisémitisme, la défense de l’image d’Israël et la menace iranienne sont les principaux thèmes abordés par les candidats qui s’inscrivent dans la continuité du travail accompli ces six dernières années par Roger Cukierman. Ils poursuivront le travail engagé, même s’ils souhaitent voir le CRIF évoluer, s’ouvrir aux jeunes et aux femmes notamment.

Pour le moment, les pronostics sont contradictoires. Mercredi 18 avril au soir, toutes les rumeurs circulaient déjà. Nos quatre amis, qui continueront au lendemain de l’élection à travailler ensemble, ont été confirmés tour à tour comme de légitimes successeurs de Roger Cukierman dont tout le monde a salué le travail et la réussite. Avec Roger Cukierman, le CRIF est devenu un acteur majeur du débat public français. La tâche de son successeur en sera d’autant plus prestigieuse, passionnante, et difficile.

Le Président du Conseil représentatif des Institutions Juives de France est élu pour un mandat de trois ans renouvelable une fois. Pour être élu, les candidats doivent recueillir la majorité absolue des suffrages exprimés par les membres de l’Assemblée Générale (présents ou représentés) au premier tour de scrutin, ou la majorité relative au second tour.

Sources Geostratégie

Posté par Adriana Evangelizt

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